Par amour de l’argent - Ghilian Reed

Ghilian parle rarement de son enfance car elle estime qu’il n’y a rien à dire : fille unique mais élevée avec sa cousine, elle a grandi dans un milieu correct bien que l’argent venait parfois à manquer à la fin du mois. Elle en garde des souvenirs qui, s’ils ne sont pas spécialement heureux, ne sont pas tristes non plus. Ses parents l’aimaient, aucun doute là-dessus, et elle les aimait –les aiment sans doute encore d’ailleurs.

Elle aurait sûrement fini commerçante d’un petit négoce car elle adore marchander, et ce depuis gamine. Ou mécanicienne. D’un naturel curieux elle a souvent passé des journées entières à démonter des objets pour comprendre leur fonctionnement avant de les remonter plus ou moins bien. Mais un jour en pleine crise d’adolescence, où elle a été très pénible il faut bien l’avouer, elle s’est rendu compte qu’avoir une vie bien rangée, un travail monotone, puis un mari et des gosses ne l’intéressaient pas le moins du monde.

Ce qu’elle voulait, c’était découvrir de nouveaux lieux, faire de nouvelles rencontres… Alors –et parce qu’elle avait déjà un caractère fortement épouvantable à cette époque- elle l’a fait. Elle a commencé à sortir la nuit, découvrir de nouveaux quartiers, tester ses limites pour tout et n’importe quoi… Et elle a aimé ça.

Lorsqu’elle a du choisir un masque définitif la demoiselle n’était pas enchanté le moins du monde. Elle a hésité longtemps, avant d’opter pour un masque de météorologue. C'était plus une envie soudaine qu’une décision mûrement réfléchie. Une fois adulte, elle a fait sa valise, claqué la bise à sa famille puis s’est volatilisée – au sens propre et figuré- dans les rues, pour ne jamais revenir.

Sa carrière dans le marché noir a débuté par des boulots de coursiers, jusqu’à ce qu’elle se fasse elle-même un petit réseau et puisse devenir indépendante. Une petite indépendante. Elle s’en est contentée durant des années, jusqu’à ce que les voyages inter-bulles soient possibles. Et là encore, son insatiable soif d’aventure l’a poussé à refaire une valise –beaucoup plus fournie- et se jeter à travers le portail sans prévenir qui que ce soit pour découvrir de nouvelles choses ainsi que de nouveaux marchés potentiels.

Mais finalement, après avoir profité de ses longues ‘vacances’ de deux ans, la revoilà déboulant à Synchro, avec plusieurs valises cette fois et deux objectifs : revendre les petites choses qu’elle a rapporté de ses voyages et faire réparer ses ailes mécaniques qui, étrangement, fonctionnent beaucoup moins bien depuis qu’elle les a tripatouillées.